Quand la surveillance d’Internet ne cesse de s’intensifier depuis des années…

Depuis les attentats de Charlie Hebdo et de la supérette Hyper Casher en Janvier, le débat autour du rôle d’Internet sur la radicalisation et le passage à l’action des terroristes ne cesse d’occuper l’actualité. Alors que depuis longtemps, l’Etat s’efforce de multiplier les outils de surveillance, le tout dernier projet de loi sur le renseignement se concentre en partie sur la surveillance d’Internet, qu’il juge essentiel dans le développement du terrorisme.

Cependant, ce projet de loi ne fait nullement consensus : un nombre croissant d’acteurs associatifs, d’entreprises, d’organismes et de personnalités s’opposent au projet de loi jugé liberticide, notamment pour Internet. Qu’en est-il vraiment ? Et est-il récent que l’Etat surveille Internet ?

Une longue histoire de surveillance du web

Tout commence il y a 13 ans, avec une vieille loi nommée LOPPSI (loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure). Cette loi fut la première à s’intéresser d’un peu plus près à Internet, prévoyant de conserver pendant un an les informations telles que les adresses IP, pseudonymes et même les login et mots de passe. A l’époque, une partie du monde de l’informatique et des associations de défense des libertés publiques s’inquiétaient des dérives que représente une telle réforme qui permettait littéralement de pénétrer légalement dans la vie privée d’un internaute.

Depuis LOPSI, les réformes favorisant la surveillance d’Internet se multiplieront. Mais les mesures les plus connues et symboliques seront votées ces dernières années, notamment sous le mandat de Nicolas Sarkozy. Deux réformes seront votées par l’Assemblée : la loi HADOPI en 2009 et la loi LOPPSI 2 en 2011, héritière de celle votée quasiment dix ans plus tôt.

Cette dernière était bien plus élaborée concernant la surveillance d’Internet en déployant un éventail de nouvelles mesures offertes aux forces de police : filtrage et censure contre la cybercriminalité (notamment la pédopornographie) avec l’aide des FAI (fournisseurs d’accès à Internet), implantation de mouchards sur les ordinateurs, l’élaboration d’une liste noire de sites interdits (liste qui n’est pas publique) et faciliter l’intrusion physique ou numérique sur les ordinateurs des particuliers pour des raisons de sécurité nationale ou pour lutter contre la délinquance et le crime organisé.

Cette loi fut particulièrement critiquée par la société civile. La CNIL se prononça en 2009 en défaveur de ce projet de loi qu’elle jugeait dangereux, propice à la censure et violant la vie privée des citoyens. Depuis cette réforme, la France est réputée être le pays le plus répressif au monde contre la cybercriminalité. Au total, pas moins de 9 lois depuis 2002 ont été votées pour encadrer et accroître la surveillance d’Internet.

Surveillance internet, renseignement

Crédit photo: Pixabay – PublicDomainPictures

Que propose la nouvelle loi à propos d’Internet ?

Dans les faits, ce projet est surtout dans la continuité des précédentes lois votées pour accroître les moyens de surveillance de la police et des services de renseignement pour lutter contre un ensemble de problèmes : la délinquance, le crime organisé et le terrorisme.

Ce projet prévoit de légaliser de nouveaux outils de surveillance qui étaient jusqu’à présent considérés comme illégaux. Fait intéressant, ces outils autrefois interdits étaient malgré tout exploités par les services de renseignement, selon l’approche du « pas vu, pas pris ». Autrement dit, si la méthode, bien qu’illégale, n’était vue par personne, alors il n’y avait pas de crime.

Parmi une foule de propositions, l’une d’elles autorisera la mise en place d’algorithmes dont l’objectif est d’analyser le trafic Internet des internautes. L’objectif n’est autre que de surveiller massivement notre façon de naviguer sur Internet et d’évaluer un potentiel comportement terroriste, en fréquentant par exemple un site faisant l’apologie du terrorisme ou visionnant une vidéo sur YouTube de propagande djihadiste.

Cet outil, appelé « boîte noire », serait donc installé avec la coopération des fournisseurs d’accès à Internet, comme Orange ou SFR, sans possibilité pour l’internaute de savoir s’il est surveillé ou non. De plus, les services de renseignement pourront utiliser des outils comme les IMSI-catcher, conçus pour intercepter les communications des téléphone portable.

La société civile largement mobilisée contre le projet de loi

Surveillance internet renseignement

Crédit photo: Déclaration commune contre la surveillance généralisée d’Internet

Au regard du développement constant d’outils de surveillance, une large partie de la société civile ne cesse de s’inquiéter et organise la résistance contre le projet de loi de renseignement, notamment via des pétitions.

Parmi elles, la pétition contre « le Big Brother français » , initiée par le politologue Thomas Guénolé et Katerina Ryzhakova, conseillère en communication, a déjà récoltée 110 000 signatures, l’objectif étant de parvenir à 150 000. Dénonçant une intrusion toujours plus importante de l’Etat dans la vie privée, cette pétition souligne le danger que représente une telle surveillance accrue sur les libertés, telle que la liberté d’expression.

Une seconde pétition, signée par Toolito, initiée cette fois-ci par des hébergeurs, se nomme « Ni pigeons, ni espions » . Mécontents d’être obligés de subir les fameuses boîtes noires, ce regroupement d’acteurs du web dénonce l’excessive intrusion de l’Etat qui susciterait une méfiance croissante des internautes. Méfiance qui serait dangereuse pour la stabilité économique des entreprises du numérique, comme les hébergeurs, les médias en ligne ou encore certaines start-up.

Reste à savoir maintenant si ces pétitions, ainsi que d’autres initiatives venant de la société et les critiques de personnalités politiques auront des conséquences positives sur le projet de loi.

Sources : >Le Monde (1) , >Le Monde (2) . Crédit photo principale : Pixabay – pixelcreatures

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Alexandre, rédacteur passionné avec une solide expérience en gestion et ressources humaines, a été Sales Business Director pendant dix ans puis Responsable RH pendant cinq ans. Diplômé de Paris Dauphine en administration des affaires, il allie expertise et curiosité pour partager des informations claires. Contact : [email protected].

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