Des galaxies en forme de disque dans un univers supposé chaotique
Les galaxies spirales que le JWST a repérées présentent des bras spiraux délicats et une structure semblable à celle de la Voie lactée, évoquant des « vinyles déformés » suspendus dans l’espace. Cette découverte est d’autant plus surprenante que les modèles traditionnels de la cosmologie prévoient un univers jeune marqué par des collisions violentes entre galaxies naines. Ces fusions galactiques auraient dû rendre extrêmement rares les galaxies en forme de disque aussi précocement dans l’histoire de l’univers.
Cependant, le JWST a révélé que ces galaxies en disque étaient bien plus communes dans l’univers primitif qu’on ne le pensait. Cette découverte a été publiée le 22 septembre dans la revue The Astrophysical Journal et pose de nouvelles questions sur la manière dont les grandes galaxies ont pu se former aussi rapidement et dans un environnement aussi chaotique.
Une surprise pour les théories de formation des galaxies
Durant des décennies, les scientifiques ont pensé que les galaxies en disque étaient rares dans les premières étapes de l’univers en raison des nombreuses interactions galactiques violentes. Ces fusions auraient déformé les galaxies en les privant de leur structure ordonnée. Mais d’après Leonardo Ferreira, astronome à l’Université de Victoria au Canada et auteur principal de l’étude, les observations du JWST prouvent que la formation des galaxies structurées en disque a débuté bien plus tôt qu’imaginé.
« Pendant plus de 30 ans, nous pensions que ces galaxies en disque étaient rares dans l’univers jeune à cause des fréquentes rencontres violentes entre galaxies », explique Ferreira. « Le fait que le JWST en découvre autant montre non seulement la puissance de cet instrument, mais indique aussi que les structures galactiques se sont formées beaucoup plus tôt que prévu. »
Retour aux premiers milliards d’années de l’univers
Les théories traditionnelles de formation des galaxies postulent que les premières galaxies sont apparues environ 1 à 2 milliards d’années après le Big Bang. À cette époque, des amas d’étoiles auraient fusionné pour former des galaxies naines, qui, par des fusions successives, ont évolué vers de grandes galaxies comme la Voie lactée au fil de milliards d’années.
Cependant, en utilisant le JWST pour observer des galaxies remontant de 9 à 13 milliards d’années, les astronomes ont découvert que parmi les 3 956 galaxies étudiées, 1 672 avaient déjà une structure en disque similaire à la Voie lactée. Cette présence précoce de galaxies ordonnées dans un univers en pleine expansion remet en cause l’idée que les galaxies en disque n’auraient commencé à se former que bien après les premiers milliards d’années.
Christopher Conselice, professeur d’astronomie extragalactique à l’Université de Manchester et co-auteur de l’étude, souligne que les observations de Hubble indiquaient que les galaxies en disque étaient presque inexistantes avant 6 milliards d’années après le Big Bang. « Ces nouveaux résultats du JWST repoussent le moment de formation des galaxies de type Voie lactée à presque l’origine de l’univers », précise-t-il.
Un impact sur notre compréhension de l’évolution des galaxies
Cette découverte a de profondes implications pour les astronomes, qui devront repenser les modèles de formation et d’évolution des galaxies sur les dix derniers milliards d’années. Si ces galaxies en disque existaient déjà dans l’univers primitif, il est possible que la majorité des étoiles se soient formées dans ces structures bien plus tôt que prévu.
Pour les chercheurs, cela signifie que notre compréhension actuelle de l’apparition des galaxies doit être revue. « Cette découverte suggère que la plupart des étoiles existent et se forment au sein de ces galaxies en disque, ce qui change complètement notre compréhension de la formation galactique », affirme Conselice. Cette avancée ouvre la voie à de nouvelles recherches pour déterminer comment ces galaxies se sont stabilisées si rapidement et comment elles ont échappé aux forces chaotiques de l’univers jeune.
Vers des indices sur l’apparition précoce de la vie ?
Le fait que notre propre galaxie, la Voie lactée, soit une galaxie en disque a souvent conduit les astronomes à associer ce type de structure avec des conditions favorables à l’apparition de la vie. Si des galaxies similaires existaient dès les premiers milliards d’années, il est possible que les ingrédients nécessaires à la vie aient été présents bien plus tôt que les scientifiques ne l’imaginaient.
Cela signifie que, si les galaxies en disque favorisent le développement de conditions stables, le potentiel d’une vie microbienne dans ces premières galaxies pourrait être envisagé. L’existence de galaxies structurées dans l’univers primitif laisse ainsi entrevoir la possibilité que les bases de la vie, ou au moins des environnements propices, aient pu exister dès les débuts de l’histoire cosmique.
James Webb : un outil qui redéfinit notre vision de l’univers
Les observations du JWST marquent un tournant pour l’astronomie. Avec sa capacité à observer des longueurs d’onde infrarouges et à voir plus loin dans le temps que jamais, le JWST a ouvert une nouvelle ère dans l’étude des premières galaxies. En révélant des structures complexes dans l’univers jeune, il pousse les chercheurs à remettre en question de nombreux postulats sur la manière dont les galaxies se forment et évoluent.
Les découvertes du JWST ne font que commencer, mais elles montrent déjà combien notre compréhension de l’univers est encore incomplète. Alors que les astronomes continuent de sonder les confins de l’univers, le télescope James Webb pourrait bien redéfinir les fondements de la cosmologie et nous aider à mieux comprendre l’origine des galaxies, des étoiles et, peut-être, de la vie elle-même.
Avec des milliers de galaxies similaires à la Voie lactée observées dans l’univers primitif, les astronomes font face à des mystères profonds qui pourraient éclairer non seulement notre passé cosmique, mais aussi les conditions qui ont permis l’apparition de la vie dans notre propre galaxie.